Savoir se taire

Vincent Lenhardt m'a enseigné une dimension essentielle du coaching : savoir se taire

Vincent Lenhardt m’a enseigné une dimension essentielle du coaching : savoir se taire.


Même quand les idées se bousculent dans votre tête et que les mots se pressent pour sortir !


Même quand vous avez compris pourquoi l’Autre souffre, et que vous vous dites : « j’ai la clé, je n’ai plus qu’à la lui donner ».


L’art de se taire va au-delà de l’art d’écouter. Vous poussez le curseur encore plus loin.


Vous retardez sciemment votre prise de parole, pour laisser à votre client du temps et de l’espace pour élaborer sa réflexion.


À mes débuts, que ce fut dur pour moi ! C’était aux antipodes de ma nature profonde. En formation, combien de fois Vincent Lenhardt m’a interrompu : « Jérôme, tais-toi ! ».


Ensuite, comme cette consigne ne suffisait pas, il m’a fixé une règle : interdiction de parler pendant les dix premières minutes d’une séance.


Et quand il a constaté qu’après dix minutes, je prenais la parole pour ne plus la lâcher, il m’a fixé une règle supplémentaire : « tu résumes ton propos en une phrase, rien de plus. »


Vous aussi, vous ferez cet apprentissage quand vous vous formerez au métier de coach.


Bien entendu, il y a des séquences pendant lesquelles vous parlerez beaucoup.


Vous ferez auprès de votre client un travail de réassurance, en formulant des signes de reconnaissance conditionnels (sur ce qu’il fait) et inconditionnels (sur ce qu’il est).


Vous l’aiderez à placer de solides protections, pour qu’il s’autorise à expérimenter des pistes nouvelles en toute sécurité. Vous soulignerez ses domaines d’excellence.


Vous l’aiderez à mieux échanger et communiquer avec ses interlocuteurs. E à trancher en cas d’indécision, en identifiant avec lui ses représentations, ses valeurs et ses croyances.


Mais offrir un accompagnement de qualité, c’est parfois se taire.


Vous connaissez cette boutade de Sacha Guitry : « Quand on vient d’écouter du Mozart, le silence qui suit est aussi du Mozart ».


Elle s’applique à notre métier : quand on coache un client, les espaces de silence qu’on lui offre sont aussi du coaching.


Pour deux raisons.


Ces silences sont chargés de sens : ils signifient que vous croyez profondément en sa capacité de changer.


Vous ne le noyez pas sous un flot de concepts et de conseils : vous portez sur lui un regard de confiance qui l’autorise à évoluer.


On est dans l’effet Pygmalion, ce sculpteur de l’Antiquité grecque qui donna la vie à l’une de ses créations, une statue de femme, parce qu’il l’admirait et en était tombé amoureux.


Seconde raison de vous taire : vous échappez à la tentation du sauvetage, cet écueil qui guette tous les coachs et les rattrape de temps en temps.


Un coach qui parle trop et trop souvent incarne la posture du sauveur et cède au phantasme de la toute-puissance. Il nie à son client toute capacité de changement. C’est une impasse.


Alors que le silence ouvre la porte à tous les possibles.


Jérôme Curnier


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