La difficulté du manager débutant

Tout manager débutant est confronté à cette difficulté : ne pas savoir

Soit il découvre une expertise métier, soit il découvre le management


J’ai fait une énorme bourde quand j’ai pris mon premier poste de manager.


On me confiait la responsabilité d’un groupe d’informaticiens. Je leur ai annoncé que je ne connaissais rien à leur domaine. 


J’avais travaillé dix ans chez un éditeur de logiciels, mais comme technico-commercial.


Mes dadas, c’était le client, l’humain, la régulation, la dynamique collective, l’aide à la décision au plan technique. Pas la direction de projet informatique. 


Or, une équipe qui change de manager l’attend d’abord sur le métier.


Je l’ignorais. J’étais inexpérimenté, porté par des valeurs comme l’authenticité, la vérité… Je me disais que faute avouée est à moitié pardonnée.


Et c’était le problème : à moitié seulement. Pour être tout à fait pardonné, j’ai galéré pendant des mois. 


Tout manager débutant est confronté à cette difficulté : ne pas savoir. Soit il découvre une expertise métier, soit il découvre le management.


Mes coachings de prise de poste tournent autour de ce non-savoir qui génère stress, inconfort, complexe de l’imposteur…


Je travaille sur 5 questions avec les managers.


🔸 Vos référents internes vous ont-ils autorisé à ne pas savoir ?


Ces référents peuvent être un parent, un grand-parent, un enseignant, l’entraîneur sportif qu’on a admiré… Quelle était leur réaction quand le coaché ne savait pas ?


S’ils étaient impitoyables, vous devez défaire leur légitimité de référent. 


Les remercier de ce qu’ils vous ont apporté par ailleurs. Vous féliciter de ce que vous leur avez apporté. Puis se dire que vous êtes quittes : la dette est effacée.


Cette première étape à la lisière entre coaching et thérapie doit être pilotée avec finesse. 


🔸 Vous autorisez-vous à ne pas savoir ?


Cette question fait écho à l’intériorisation de messages contraignants parentaux (« sois parfait ») ou renvoie à l’orgueil : personne n’aime afficher ses lacunes. 


Pour avancer, le nouveau manager doit se donner cette autorisation.


🔸 Ma hiérarchie me donne-t-elle l’autorisation de ne pas savoir ?


Une fiche de poste décrit rarement la durée et la pente de la courbe d’apprentissage. Ce flou entretient l’inconfort. 


J’encourage le manager à demander une clarification : calendrier, objectifs, niveau de performance attendu, etc.


🔸 Mon équipe me donne-t-elle l’autorisation de ne pas savoir ?


Non. Qui a envie de monter en voiture aux côtés d’un jeune conducteur qui vient d’avoir son permis ?


Le manager doit accepter de vivre avec cet inconfort : taire la vérité, peser avec soin les informations qu’il divulgue, miser sur un apprentissage rapide pour sortir des faux-semblants.


🔸 Pendant combien de temps puis-je ne pas savoir ?


À chacun de l’apprécier, après avoir sondé sa hiérarchie, jaugé son équipe et défini son plan de formation. 


Le but n’est pas de devenir omniscient, mais de tenir solidement la barre. Un manager reste un humain : il peut s’offrir une petite faiblesse de temps en temps !


Jérôme Curnier


dans Billets
Le coaching du manager expérimenté